Life

Une maison à Paris

Quand j’étais petite, je ne savais pas où je voulais vivre. J’ai grandi dans l’Essonne, bien que mes parents avaient un pavillon avec un grand jardin, il y avait des vaches dans les champs derrière chez nous. Je m’amusais à courir après les lièvres sauvages, et je faisais du vélo dans les bois à côté de chez nous. Aujourd’hui, ces champs sont devenus une grande zone d’activité avec des grillages partout. Avec mes amies, nous faisions souvent des barbecues dans le jardin. Je passais beaucoup de temps dehors. J’ai eu l’habitude d’être plus souvent dehors que dedans.

En grandissant, je voulais vivre chez moi, dans mon chez-moi, avoir mon indépendance, ma liberté, de pouvoir vivre ma vie, cependant, je n’avais pas de lieu précis où je voulais aller. Finalement, ce sont les études et d’autres contraintes qui m’ont fait choisir Paris. J’ai eu la chance de pouvoir avoir un petit deux pièces dans le 9ème arrondissement de Paris. J’y suis restée 5 ans environ. Puis j’ai rencontré L., son studio étant plus petit que mon deux pièces, elle s’est installée chez moi. Rapidement le deux pièces est devenu trop petit pour nous deux. Nous n’avions pas encore le projet d’avoir des enfants, mais nous voulions un appartement plus grand. Nous avons trouvé un plateau à rénover. Il a fallu faire beaucoup de travaux, mais nous avons aménagé ce plateau comme nous le voulions. Cette période était un peu instable à cause des travaux, mais c’était une vraie aubaine de pouvoir faire une telle opération immobilière. Nous étions très heureuses de vivre dans ce bel appartement. Nous y sommes restées 10 ans environ.

Nous avons eu le projet d’avoir des enfants. Étant donné que nous sommes deux femmes, il était un peu plus compliqué pour nous d’avoir des enfants. Nous sommes allées en Belgique et pouf, nous avons eu deux belles petites filles. C’est à ce moment que nous avons commencé à trouver ce bel appartement un peu petit. Pour un couple, voire pour un couple avec un enfant, notre apparemment était très bien. En revanche pour un couple avec deux enfants, cela devenait un peu plus compliqué au niveau de la place. Nous commencions à entasser des affaires absolument partout. De plus, nous n’avions pas de balcon ni de terrasse ni de cave. Avec le Covid-19 et les confinements successifs, nous voulions vraiment un espace extérieur et un peu plus de place, notamment pour le rangement ainsi que pour nos loisirs respectifs, la pâtisserie pour moi et la couture pour ma femme.

Mon rêve était d’avoir une maison, déjà, parce que j’ai grandi dans une maison, j’ai eu l’habitude de vivre dehors, mais je voulais aussi que nos filles puissent se défouler dehors sans que nous soyons inquiètes qu’une voiture les renverse. Pour celles qui connaissent Paris, vous savez qu’il est difficile de laisser des enfants en bas âges jouer dans les rues de Paris. Les cours d’immeubles sont souvent trop petites, idéalement, il faudrait une rue privée, une rue qui appartient à la copropriété et où les enfants de la copropriété peuvent se retrouver et jouer ensemble. Pour la version encore plus riche, avoir son propre hôtel particulier. Nous en sommes loin. Nous rêvions aussi d’un espace extérieur, un grand balcon ou une petite terrasse. Nous n’avons pas vraiment la main verte, donc nous aurions du mal à entretenir un jardin. Déjà que je n’arrive pas à faire survivre les plantes que mes amies m’offrent, apparemment elles meurent par noyade, comme quoi, j’essaie de les faire survivre en les arrosant trop. Nous voulions pouvoir nous installer dehors, pour manger, pour travailler, pour se détendre. Nous voulions pouvoir installer une table et quelques chaises ainsi que des transats, et pourquoi pas, même un barbecue, j’adore les poivrons grillés.

Avoir une maison a des avantages et des inconvénients. Il n’y a pas de voisins au-dessus de chez nous qui met ses basses à fond pour écouter sa musique. D’en dessous, nous entendons juste un boom boom très agaçant. Certaines me diront que c’est la vie à Paris, un peu comme une fatalité. C’est le vivre ensemble. Non, moi je ne vis pas « ensemble », je vis chez moi, et je veux être tranquille chez moi. Vous voyez un ours dans sa caverne, si vous ne le dérangez pas, l’ours ne vient pas vous embêter, si vous le dérangez, je vous conseille de prendre vos jambes à votre cou. Vous pouvez m’imaginer comme cet ours au fond de sa caverne. Les désavantages, c’est qu’une maison, c’est cher, aussi bien à l’achat qu’à l’entretien. S’il y a de gros travaux, tous les frais sont à votre charge. L’autre problème d’une maison à Paris, c’est qu’il y a un accès direct depuis la rue, ce qui augmente le risque d’infraction. Souvent il faut mettre des barreaux à ses fenêtres afin de pouvoir assurer la maison. De plus, n’importe quelle passante peut regarder chez vous, ce qui n’est pas très agréable. Encore une fois, idéalement, ce serait que la maison soit dans une rue privée accessible que par les gens de la copropriété.

Je ne vais pas trop m’attarder sur tous les avantages d’avoir une maison, car il y en a beaucoup et puis c’est aussi une question de point de vue. Si cela se trouve, madame Michu n’est absolument pas d’accord avec moi et préfère son appartement avec ses voisins qui font boom boom. Étant très sensible au bruit, je fais très attention à cet aspect lors que je regarde un logement.

Ce qui n’était qu’un rêve est arrivé. Nous avons acheté une maison dans Paris. C’est une petite maison, n’allez pas croire que nous avons acheté un palace. La maison a deux petites chambres, une grande cuisine salle à manger, un salon, une salle de bain, une salle de douche avec toilette ainsi qu’une toilette indépendante. Il y a aussi un sous-sol que nous avons transformé en grand bureau auquel nous avons ajouté un puits de lumière naturelle ainsi qu’une cave supplémentaire au sous-sol pour ranger tout notre bazar. À l’étage, nous avons une terrasse suffisamment grande pour installer une table, des chaises et des transats. Administrativement, c’est un appartement, car nous avons acheté un tiers d’une maison très longue. Nous avons deux voisines, une voisine à « droite » et une voisine à « gauche ». Nous avons acheté le tiers au milieu de la longue bâtisse. La maison est particulièrement calme et nous sommes sur une rue privée. Dès que les enfants se seront habituées à la nouvelle maison, elles iront probablement jouer dehors avec les autres enfants de la copropriété.

Cela ne fait que cinq jours que nous avons fait le déménagement, et tout cela semble encore irréel. Je crois que nous ne nous rendons pas encore compte que nous vivons dans une maison, dans notre maison. Au passage, si vous avez l’argent, je vous recommande vivement d’avoir recours à des déménageuses professionnelles. Nous sommes encore dans les cartons, bien que nous ayons épongé la majorité des cartons. Il reste quelques travaux à faire, mais nous profitons déjà de la maison.

Les enfants découvrent la maison, c’est comme un immense nouveau terrain de jeu. Elles explorent tous les recoins. La nouveauté, c’est l’escalier, c’est un obstacle certain pour les enfants. Quelques habitudes vont aussi changer, par exemple, les enfants s’habillent tout de suite après s’être levées puis descendent dans la cuisine pour prendre leur petit-déjeuner, alors que dans l’appartement, elles vivaient en pyjama la majorité du temps. Il y aura bien entendu, quelques ajustements par rapport nos habitudes dans notre appartement précédent.


Je reprends ce billet 6 semaines après notre déménagement.

Nous nous habituons à notre nouvelle vie, en changeant de quartier, nous changeons nos repères. J’ai fait un tour des magasins pour l’alimentaire, j’ai déjà mes petites habitudes. C’est un peu moins pratique qu’avant mais paradoxalement, alors que nous nous sommes rapprochées du centre de Paris, les courses vont peut-être me coûter un peu moins chères, la différence de prix entre un Monoprix et un Carrefour est assez tangible.

J’ai fini tout le bricolage de la maison, les lampes, les rideaux, le meuble pour l’îlot central de la cuisine, la balustrade pour la mezzanine de la chambre des enfants, les quelques meubles à fixer et autres broutilles dans le genre. Nous avons aussi rangé toutes nos affaires et nous avons donné les cartons du déménagement sur l’application Geev. En rangeant nos affaires, nous avons un peu fait le tri et nous avons donné tout ce qui ne nous étaient plus utiles sur Geev. C’est très pratique de pouvoir donner à des gens qui en ont besoin plutôt que de les jeter. Cela fait moins de gâchis et nous aidons un peu autrui ainsi.

Nous n’avons pas encore aménagé la terrasse, nous ferons sûrement cela lorsque les beaux jours reviendront. Je n’ai pas encore vraiment profité de mon nouveau bureau, car je vais beaucoup au travail plutôt que de faire du télétravail. Cerise sur le gâteau, je peux aller à mon travail en marchant. En revanche, j’ai bien testé la cuisine et je suis vraiment très contente. J’ai tellement plus de place qu’avant et surtout la plaque à gaz 5 feux, c’est super pratique, je peux utiliser trois grands récipients simultanément alors qu’avant je ne pouvais en utiliser qu’un seul. Nous nous faisons aussi à la nouvelle disposition de notre table. Préalablement, nous pouvions marcher autour, maintenant elle est dans un coin avec un banc, c’est moins pratique pour s’y installer et si nous sommes sur la banquette, nous sommes assez vite coincées, mais cela fait une cuisine salle à manger assez mignonne.

Pour les trajets aux écoles des enfants – maternelle et primaire -, c’est bien plus pratique qu’avant, nous pouvons y aller à pied, c’est nettement moins contraignant. De plus nos filles aiment bien marcher après l’école et nous passons à la boulangerie pour leur acheter des goûters. Elles sont à fonds sur le pain au chocolat. Quand la grande sœur veut quelque chose, la petite sœur veut exactement la même chose. Je ne suis pas persuadée que la petite sœur veuille vraiment un pain au chocolat alors qu’il y a des gâteaux tellement plus sucrés en vente dans la boulangerie.

Nous avons rapidement rencontré les voisines avec enfants. Il se trouve qu’il y a quelques familles qui ont des enfants qui sont dans la même tranche d’âge que nos filles. Les enfants ont joué ensemble dans la rue privée. C’était vraiment super de voir tous ces enfants jouer ensemble dehors, à contrario d’être coincés entre les quatre murs d’un appartement. De plus, c’est assez sympa d’avoir des amies dans la copropriété. C’est une très grande copropriété, tous les immeubles et toutes les maisons de la rue privée forment une seule et même copropriété.

Comme nous sommes sur une rue privée, nous n’avons pas de barreaux à nos fenêtres du rez-de-chaussé. C’est comme un petit village. La rue privée est une petite rue pavée très fleurie, bien entretenue. Un gardien veille à la sérénité. Franchement, je crois que pour Paris, nous ne pouvions pas vraiment rêver de mieux.

Le seul défaut, c’est que nous ne pouvons pas garer le vélo cargo Yuba que nous avons, en sécurité dans la copropriété. C’est interdit. Nous devons donc le laisser dehors. Ma femme a ajouté un nouvel anti-vol électronique avec GPS et application smartphone au cas où il serait en train de se faire voler. De plus elle enlève systématiquement la batterie du vélo, ce qui diminue terriblement l’intérêt du vélo, sans la batterie, ce vélo cargo est assez difficile à manœuvrer. Ma trottinette a trouvé sa place sur un rebord de l’escalier de notre maison, ainsi elle ne gêne personne. J’ai finalement renoncé à m’acheter un vélo électrique à cause de cet inconvénient. D’autant plus que je n’aurai pas acheté un vélo cargo qui se font moins voler, mais un joli vélo individuel électrique, probablement une belle cible pour les voleurs. Je vais m’épargner ce stress, surtout que je peux aller au travail à pied. Je me sers de ma trottinette quand je dois aller plus loin.

Nous avons beaucoup de chance d’avoir une maison à Paris. C’est un luxe dont peu de personnes peuvent profiter. Je n’aborde pas nos apports financiers ou nos revenus, car je garde ces informations privées, mais il est évident que nous sommes plutôt bien loties. De façon générale nous faisons attention à nos dépenses, ce n’est pas parce que nous avons de l’argent que nous devons le dépenser n’importe comment. Sur plusieurs dizaines d’années, cela fait une vraie différence et cela aide à avoir un apport plus conséquent pour acheter un bien immobilier. J’ai parfaitement conscience que la somme nécessaire pour acheter cette maison est une somme que la plupart des Françaises ne gagneront jamais en toute une vie. Cela reflète bien les inégalités sociales. Peut-être nous donnons nous bonne conscience avec nos activités associatives, le bénévolat et les différents dons que nous faisons ? Nous avons beau espérer un monde plus juste, plus égalitaire, plus équitable, plus adelphe, plus social, malheureusement les Français continuent de voter pour des politiques plus libérales. Cela dit, je suis aussi quelqu’une qui se bat pour ses rêves, ses convictions, ses idées. Je voulais revivre dans une maison, ma femme ne voulait pas quitter Paris. Nous achetons une maison dans Paris. Dire cela ainsi fait tellement bourgeois.

Quand nous avons acheté cette maison, elle était clairement dans son jus des années 70′, nous avons tout refait faire. Pour cela nous avions une architecte d’intérieur et un entrepreneur, nous avons aussi eu recours à un bureau d’études. Elles ont d’abord tout cassé, littéralement tout cassé, et ensuite, elles ont fait toutes les pièces, les sols, les plafonds, les murs, l’électricité, la plomberie, la peinture, le parquet, le carrelage, la menuiserie, les fenêtres, le gros œuvre, tout. C’est dingue comme les travaux du bâtiment ont des spécialités différentes et qu’il les faut toutes pour pouvoir faire une maison. Les travaux ont pris environ cinq mois. Nous sommes très satisfaites du résultat, le résultat est vraiment de qualité. L’avantage de tout refaire, c’est que nous faisons tout comme nous voulons. Il aura fallu choisir la cuisine, les couleurs, la disposition des chambres, l’aménagement du salon et pleins d’autres choses nécessaires pour les travaux. Pendant toute la durée des travaux, nous avons parlé à nos filles de la future maison, qu’elles allaient avoir une chambre plus grande, un espace de jeu supplémentaire, nous leur avons fait visiter la maison plusieurs fois pendant les travaux. Ainsi la transition entre l’appartement et la maison n’a pas posé de problème. Un matin, elles sont parties de l’appartement pour aller à l’école et le soir, elles sont rentrées dans la maison. Entre temps, nous avions fait en sorte que leur chambre soit prête.

C’est notre maison à Paris, et j’espère que nos filles vont y grandir heureuses.


Je mets quelques photos, peut-être que je complèterai plus tard. Dans la mesure où l’article est public, je fais attention à ne pas mettre de photo qui permettrait de localiser la maison.

Le déménagement :

La maison :